___ Fanfiction: Little Nightmares

Little Nightmares II

If Crossblood

Chapitre 23 (partie 1/2):

Monster Six

— Que viens-tu de dire ?

À chaque mot employé, la gorge de Mono devenait sèche.

L'air était devenu chargé. La vérité était fracassante, brutale. Les cliquetis de l'eau venant s'écraser sur le sol béton ajoutaient un air mélancolique, limite plus oppressant pour l'enfant, complètement abasourdit.

Finalement, pour dissiper ce malaise qui s'installait dans l'équipe, Gil passa une main dans ses cheveux, releva quelques mèches blondes.

— Au top, un monstre en plus. Mais un faible. T'es en train de nous dire que tu es la vraie Nueve alors ?

— Mmhmm.

D'un geste mesuré, elle considéra sa main gauche.

— Mais t'as bousillé ce corps que j'ai créé de mon sang. Et ça me fait encore mal.

La brune mentionnait pour son doigt manquant. Elle jeta un regard noir vers Gil qui lui souriait, presque fier.

— J'ai fait mal à un monstre ? Génial ! Je suis le meilleur !

— Tais-toi Gil. L'interrompt Mono. Nueve. Ton... Ta copie, il se corrige, tu peux m'éclaircir plus ?

— Elle est une partie de moi.

— Allait-elle disparaître à un moment ou un autre ?

D'un coup silence, Nueve baissa ses yeux. Elle semblait réfléchir à sa question. Puis, après une bonne minute, elle répondit enfin :

— Aucune idée.

— Hein ? S'étonna le brun, les yeux ronds, les sourcils bien haussés.

— Je n'ai parié sur rien. J'ai juste fait. Et j'étais plongé dans le noir. J'ai imaginé. J'ai rêvé. Et j'ai peins.

— Pardon ?

La fillette à la salopette releva sa tête et eut un sourire léger.

— Je n'aime pas trop le noir. J'ai fermé les yeux. Et j'ai la facilité de rêvasser. J'avais un pinceau entre mes doigts. Et un gros tableau blanc est apparu devant moi avec une palette de couleurs. J'ai peins.

Un lourd silence s'installa. Gil ne réalisa que quelques secondes se succédant.

— Uh ! Alors ces tableaux que je n'avais jamais vu auparavant, c'est toi qui les a faites ?!

— Oui.

— Tu m'as super bien dessiné en étant perché en bas ! Rit-il en bombant son torse. Mais t'aurais pu me faire un truc plus significatif... comme... je ne sais pas ; moi sur un beau trône avec une couronne ! De l'or et..._

— Comment as-tu su que j'étais le Thin Man ? L'interrogea Mono, la voix tremblante.

Tout en se dandinant sur place, la petite-fille souriait toujours. Ses pieds-nues éclaboussant les petites flaques d'eau se formant sous elle, ce qui provoquait des mouvements, floutant ainsi son propre reflet.

— Je vois des choses même si je suis enfermé au musée.

Elle zieuta vers le Thin Man, qui demeurait silencieux, stoïque. Il était encore présent, encore fort, puissant avec cette aura ténébreuse qui l'enveloppait. Il avait cessé d'être violent, suite au discours de Mono.

— Tu vas faire quoi de lui ? Le questionna Gil, prudent.

— Je... Je ne sais pas.

— Vous ne pouvez pas genre... fusionner ?

En glissant cette proposition, le blond cendré faisait un geste distinctif avec ses mains. Nueve l'observa du coin de l'oeil, plissa ses yeux, l'étudia en silence, son visage s'assombrissait tandis que le brun levait ses mains, prit au dépourvu.

— J-Je ne sais pas ? Je ne suis pas certain de comment ça fonctionnerait et...

— T'as des supers-pouvoirs comme lui ! Ce serait du gâteau !

— Et si son corps ne tenait pas ? Lança Nueve.

Surprit, les deux garçons la considérait. Très vite, ils faisaient le point, admettant que pour son cas à elle, sa santé s'était détériorée. Cette possibilité était envisageable et Mono serrait ses poings. D'une part, il voulait redonner une seconde chance à son lui du futur... Mais qui sait quels impacts il pourrait avoir sur lui ?

Peut-être il se ferait remplacer. Ou perdrait ses souvenirs.

Se montrant un peu égoïste, Mono se faisait un blocage. Refusait de faire quoi que ce soit. Après tout, il avait aussi des rêves ! Une détermination !

« Qu'importe ta décision, j'aurai refusé. »

Ahuri, Mono tournait sa tête, jaugeait son autre lui, qui venait de lui parler dans son esprit.

— Quoi ?

« J'ai aspiré le pouvoir de Six. Il est ingérable. Tu n'aurais pas fait long feu. » Lui révéla le Thin Man, sérieux.

— Comment ça, ingérable ? Répéta le petit-garçon, abasourdit.

« Il s'agite énormément, tel un parasite. La quantité d'énergie est au-delà de toutes espérances, je suis encore épaté que Six ait tenue jusqu'ici. »

L'estomac de Mono se compressait douloureusement tout comme son expression traduisait tout son choc. Les images de la noiraude défilaient dans son esprit. Il se rappelait de leur rencontre. De leur aventure. De leur entraide jusqu'à l'abandon. Des retrouvailles à une nouvelle promesse qui se concrétisait.

Elle devait être de nouveau enfermée dans la Tour.

Le brun souffla, tendit ses deux bras vers l'avant, se concentra. Visualisa la Tour. Ses paumes se mettaient à chauffer et tout autour de lui, se mettait à vibrer, le sol avec. Les commentaires de ses alliés devenaient lointains alors que des multiples sons fendaient dans l'air. Mono brisait l'espace et le temps, usant de ses capacités reliés à la Tour de Transmission.

Tous furent atterris à l'entrée. Une lueur fushia s'échappait de la petite fente, invitant les enfants à plonger dans la pure folie, qui se cachait à l'intérieur de la structure. Juste à coté, une silhouette familière, recroquevillée contre le mur. Les ombres dansaient, à coté de cette lumière tamisée.

— Enfin vous êtes là...

— Shadow Six... Murmura Mono, étonné de la voir ici, hors de la Tour, loin de Six.

— Je vous attendais. T'attendais.

Shadow Six se releva, fixa intensément le brun en premier.

— Sauve-la...

Le timbre de sa voix était faible. La distance avec Six devait énormément l'impacter, l'affaiblir. Pour qu'elle lui demande cela, c'était que la situation était bien critique.

La pluie devenait des aiguilles qui le transperçait de partout. L'enfant avait l'impression de porter sur ses épaules un énorme fardeau ; le poids des responsabilités lui étant bien trop lourd pour lui.

Était-ce devenu pire pour Six ?

Un grondement surgissait, suivit d'un éclair vif, promptement, venait déchirer les cieux. La pluie s'intensifiait.

Le vent se mit à souffler si fort, que des volets se battaient contre les façades. Des papiers s'envolaient, des canettes probablement échappées des poubelles roulaient, erraient sans but, guidés par le souffle.

Mono pouvait rien promettre. Il s'agissait d'une mission suicidaire, il en était bien conscient. Le brun avait l'impression que les difficultés s'enchaînaient, avec un niveau bien plus élevé que les précédents. Et il était à cran. Pour Six, il ferait de son mieux.

— Pourquoi t'es là, toi ?! S'indigna Shadow Six, se montrant un cran plus dure avec le Thin Man.

« Baisse d'un ton... »

— J'espère que Mono t'a foutu la raclé !

« Ce n'est pas le cas. »

— Il aurait dû ! Tu es un vieux imbécile ! L'insulta t-elle gratuitement, sans aucune retenue.

Le Thin Man s'abaissa, se mit sur ses genoux, retira doucement son chapeau qu'il avait récupéré. Il avait un sourire léger, mélancolique, peiné.

« Et toi, tu es une vraie peste. »

La pluie s'abattait sur lui. Ses paroles troublaient Shadow Six. Son doigt pointé vers lui, son autre main étant serré, elle finissait par se résoudre à abandonner ses serments.

— ...Eh bien, ça se pourrait. Concéda t-elle, avec un rictus.

« Tu l'es. »

— EH !

Face à une scène de ménage comique entre son « lui » plus âgé et une Shadow Six très énergique et espiègle, il avait l'impression d'être de trop.

Cependant, ce moment qui coupait les moments les plus cruciaux, fut bref. Le Thin Man dirigea son regard vers Mono. Et d'un simple contact visuel, tout venait d'être dit, transmit. Le coeur du garçon battait à la chamade, il écarquillait ses yeux.

— Tu... Tu es certain ?

« Je ne peux pas pardonner mes actes. Mais si tu es certain que tu peux changer le cours de l'histoire... »

Son autre lui soupira, tendit sa main, la paume dirigée vers le ciel. Elle était fragile, la peau sur ses os. Sa respiration était lourde, lente. À travers ses iris bleus, on pouvait y lire de la fatigue et une étincelle de détermination.

Gil et Nueve ne se doutaient de rien. Ni n'étaient capables de voir Shadow Six, ni de l'entendre comme le Thin Man. Ils restaient silencieux, perdus, devant cette interaction surnaturelle.

Un peu hésitant au départ, Mono voulut accorder une confiance à son autre lui. Après tout, il avait bien accepté de ne plus l'affronter. Et là, bien trop épuisé, il tenait à lui conférer le reste de son énergie.

Pour disparaître sans douleur, avec sa création, qui se tenait à ses cotés, bien plus petite que lui en taille.

Dès que la main du brun se posa sur celle du Thin Man, il ressentit une violente décharge se propager dans tout le corps. Crispé, il retint un gémissement, bascula raidement sa tête vers l'arrière, les yeux écarquillés.

Ça pulsait dans ses veines. Son sang bouillait.

Très vite, la douleur lancinante se dissipa, tel de la brume dans l'air. Haletant, Mono fixa ses mains, secoué.

Il avait l'impression d'avoir récupéré de l'énergie. Il n'avait plus aucune douleur. Ni à son pauvre dos meurtri avec l'épisode précédent de la chute du train.

— Oï ! Il t'a fait quoi ce fou ?! S'inquiéta Gil.

Dans l'immédiat, Mono ne lui répondit pas. Il essayait de traiter cette information du mieux qu'il le pouvait. Il avait du mal à digérer le fait que le Thin Man l'aide ainsi.

Qu'il lui donne une carte d'accès à la possibilité d'un monde meilleur.

— Maintenant va sauver Six ! Elle a besoin de toi ! Car le vieux au lieu de corriger ses bêtises préfère t'envoyer toi !

« Silence. »

— Sale vieux !

« Tu m'épuises.... »

— J'aurai voulu m'éclater avec eux encore plus longtemps ! S'indigna Shadow Six, elle écarta ses bras.

À travers sa voix, on pouvait deviner à quel point ça l'impactait. Qu'elle était sincère. Son créateur la considéra, ferma ses yeux, encaissa en restant muet. Shadow Six serra ses poings, baissa sa tête, souriait avec amertume. Elle avait bien comprit ce que cela signifiait.

Pardon.

Il ne le prononçait pas ouvertement, verbalement. Toutefois, ses réactions suffisaient amplement pour que l'ombre comprenne ce message calfeutré par ce silence et les paupières closes.

Elle s'asseyait, s'adossait contre le genou du Thin Man. Les ténèbres qui l'enveloppaient, s'évaporaient peu à peu.

— Bah, j'imagine qu'on fait tous des erreurs...

Shadow Six riait amèrement, tenta de rester un peu elle-même, bien qu'elle savait qu'elle n'en avait plus pour longtemps, comme son créateur, qui demeurait toujours silencieux. Sous cette averse qui témoignait que leur lumière n'allait plus tarder à s'éteindre.

L'ombre fixa Mono et lui fit un signe de ne plus traîner d'avantage. Le brun inspira un coup et inclina sa tête, le coeur serré.

— Merci... Au revoir.

L'enfant appela à ses alliés à venir le suivre – s'ils se sentaient capables. Sans grande surprise, Nueve et Gil le suivait, sans faire d'histoire. Chose qui apaisa la conscience de Mono. Sincèrement, s'il allait à la rencontre de Six, il était incertain que son mental reste aussi intact.

Avoir d'autre soutien n'était pas de refus.

Une fois que le trio traversait la porte, le Thin Man releva sa tête. Les lèvres entrouvertes, il tendit sa main vers eux. Il semblait vouloir retenir une personne en particulier.

Quand la porte de la Tour se refermait derrière les enfants, le Mono du futur abaissa sa main.

— Tu ne seras pas seul. Glissa Shadow Six, en fermant ses yeux.

« Je ne comprend pas.. pourquoi tu fais ça. »

Un rire léger et à la fois triste s'échappa de sa création.

— Je comprend tes intentions. Et ceux de Mono et de Six. Tu n'es pas complètement pardonné, mais c'est compréhensible, tes actions.

Le Thin Man ferma ses yeux. Il sentit ses doigts disparaître en fines particules monochromes.

— Au moins tu pars avec un peu d'espoir pour ton autre toi ?

« ... Je ne crois en plus rien. »

Il marmonna tout seul, alors que Shadow Six venait de s'évaporer dans l'air, ne laissant plus aucune emprunte d'elle :

« Je ne lui souhaite que du courage. »

Manquant d'énergie, pour préserver cette forme monstrueuse, alimentée par la Tour de Transmission de Pale City, le futur Mono releva sa tête, admira ce ciel vaste, grisâtre, laissait les gouttes de pluie s'écraser sur son visage. Avec un maigre sourire, il sentit son coeur cesser de battre.

Sa silhouette se décomposait en plusieurs infimes petites particules turquoises, sa présence ne faisant plus surface.

**

*

La porte s'était lourdement refermée derrière eux, après les avoir accueillis.

L'air était statique.

Plusieurs longs escaliers en bois étaient sectionnés, n'avaient aucun support pour maintenir. Toute loi de gravité n'existait pas. Plusieurs jouets planaient sur place, comme des objets ou meubles dans les airs. Il y avait des portes inaccessibles d'accès, placés en hauteur.

Tout le lieu était plongée dans des néons au ton fushia ou violet ce qui laissait croire à un monde de rêverie, de toute déconnexion à la réalité.

Pour s'amuser, Gil poussait un cri. Ceci renvoyait plusieurs échos. Le plus lointain sonnait tordu, aiguë et ceci mettait presque mal à l'aise le garçon.

— Jamais je n'aurais pensé que l'intérieur soit aussi... Bizarre. Dit-il finalement, avec un sourire.

Nueve se mettait à tousser violemment. Ses jambes la lâchèrent et elle tomba sur le sol bétonné. Mono s'empressa de lui frotter le dos, réellement concerné par son état. Savoir déjà que son amie soit prête à tout pour l'aider à sauver Six était touchant. Mais à la fois...

Il n'arrivait pas à se sentir aussi serein, maintenant qu'il savait la réalité.

Une partie de lui voulait encore croire naïvement en elle. Après tout, Nueve ne l'avait jamais abandonné jusque là. Quand ils devaient s'entraider, elle ne lui avait jamais lâché la main. La brunette ne l'avait pas non plus repoussé quand elle savait son identité et les risques avec Six.

— Allez... Tiens bon. Dès qu'on retrouve Six, on s'en ira. On va trouver une solution pour te guérir aussi... Voulut-il la motiver.

Avec un maigre sourire, Nueve retira sa main de sa bouche. Sur sa paume, du sang tout chaud. Son teint avait encore plus pâlit.

— Je...sais...

La voir dans cet état eut pour effet d'un coup de poing dans le ventre du garçon. Comment pouvait-il oser encore la soupçonner alors qu'elle était grièvement malade ? Que son corps ne tenait que à un fil ? Il grinça des dents, poursuivit ses frottements sur le dos de sa camarade. Il appuyait parfois trop fort, ce qui la faisait gémir.

Mono s'arrêta et s'excusa, se redressa nerveusement.

— Je vais monter en premier avec Gil. Rejoins nous à ton rythme. D'accord ?

Sur ces mots, le brun se redressa et se mit à courir vers les escaliers flottantes, se hissa vers le haut, en direction de l'unique porte disponible, plus haut, l'arrière de sa longue veste traînant derrière lui.

Cette Tour avait légèrement changée, depuis la première fois qu'il était entré. Toutefois, il connaissait ces ressentis. Cette sensation de plonger dans la folie, être avalé dans quelque chose de instable, dans le néant.

Gil l'observa faire et plongea ses mains dans les poches de sa petite salopette.

— Il a prit de l'énergie après avoir touché le Thin Man. Lui fit remarquer le garçon.

— Oui.

— Hmm...

L'expression de Gil devenait plus sérieux, méfiant. Nueve le remarquait.

— Tu lui fait réellement confiance ?

La brunette ne répondit rien. Elle se contenta de le laisser finir. Son ton était sous-jacente d'une agressivité.

— Moi toujours pas. Et si il redevenait le monstre qu'il était ?

Espérant pouvoir faire un peu réfléchir sa camarade derrière lui, le blond cendré remonta les marches, près à suivre Mono qui venait de passer outre la porte.

La fillette, restait derrière. Elle se redressait péniblement, bien que à chaque battement de son coeur devenait de plus en plus lourd, elle garda un œil sur le blond cendré. La brune ravala sa propre salive pour ne pas rester déshydrater et suivit comme elle le pouvait les garçons. Intérieurement, elle se faisait violence pour ignorer ses propres douleurs.

Franchissant la seule porte accessible en haut des escaliers, Nueve pantela, essuya du revers de sa main la sueur qui glissait le long de sa mâchoire. Il y avait encore des escaliers. Elle pouvait abandonner le comptage, tellement que ça lui donnait mal à la tête. La fillette transpirait, pâlissait de plus en plus.

Après plusieurs effort, elle se retrouvait perdue dans ces couloirs, sans fin. Il y avait tellement de portes entrouvertes ! Pas un seul son ni le moindre signe de ses alliés. Quand la petite-fille les appelaient, seul son écho résonnait entre ces deux murs qui s'étendaient à perte de vue.

Alors que Nueve commençait à désespérer, à gratter son bandage autour de son doigt coupé, sous pression et nervosité à l'idée de se retrouver de nouveau seule, une étrange et inattendue mélodie la faisait sursauter. C'était doux. Une boîte à musique, apaisante, lente, qui donnait l'impression de rêver.

Impossible de reconnaître le lieu, cette source. Prête à s'engager dans une direction aléatoire, guidée par son intuition, la brune marcha, le plancher grinçant sous son poids pourtant léger comparé aux monstres.

S'aventurant sans repère ni plan, seule, Nueve finissait par apercevoir du mouvement, plus loin. Une silhouette qu'elle pouvait reconnaître.

Un manteau de pluie jaune. Avec la capuche placée, recouvrant le crâne.

— Six !

Prise d'une quinte de toux, Nueve dû prendre de nouveau une pause. Elle releva sa tête, vit son amie s'engouffrer dans une pièce, sans se tourner vers la brune.

— Attend-moi !

Affaiblie, Nueve s'aidait des murs, fissurées. Il y avait quelques débris qui rebouchaient une porte, ses oreilles bourdonnaient, son coeur battait lentement alors qu'elle prenait de grandes inspirations.

Elle voyait de plus en plus flou.

Nueve fermait ses yeux. Massait ses paupières.

— Allez, grouille-toi... Se parla t-elle pour elle-même.

Plus elle avançait, plus le sol changeait. Cette fois-ci, ce n'était plus du bois, mais du béton froid, glacial, qu'elle pouvait vite deviner à la sensation sous ses pieds nus.

Il n'y avait plus aucune lumière violette. Sauf vers une porte, bien distincte, l'invitant à s'y rendre. Supposant qu'il s'agissait d'un message, Nueve reprit son chemin, déterminé.

Dans cette pièce, la lumière tamisée violette était un peu violente dès son arrivé. Une fois habituée à cela, Nueve écarquilla ses yeux, sous le choc.

Une boite à musique tournait en boucle, déformée, rattachée à des multiples fils électriques, toutes, branchées à des télévisions suspendues au plafond. À terre avec l'objet, Six. Plus grande. Ses membres étaient longs, distordues. Ses doigts étaient beaucoup trop longs, ses pieds placés à un angle qui ne devrait pas être fait pour un humain normal. Ses cheveux étaient plus longs.

Et elle était plantée, ligotée par les fils électriques. Sa tête, levée vers le haut. Fixant les écrans télévisées, exposant des oeils violets, en mosaïque.

Six respirait. Fortement. Gardait contre elle la boite à musique, comme s'il s'agissait de la seule chose la plus précieuse au monde. La manivelle tournait à un rythme lent, soutenu, sans fin.

On avait rendu Six en un monstre.

Un monstre, attaché, lui forçant à voir des écrans, comme si on voulait la programmer différemment. Lui lavant le cerveau. Lui faisant perdre toute sa mémoire, son identité.

— C'est le Thin Man qui lui a fait ça ?...

Il fallait qu'elle prévienne Mono.

Au plus vite, Nueve fit demi-tour. Appela son ami.

Les couloirs avaient changé. Encore. Ce qui était anormal. Était-ce le lieu lui-même ou bien devenait-elle de plus en plus folle ?

— Mono ! Où es-tu ?! J'ai retrouvé Six ! Il faut qu'on l'aide ! Hurla Nueve.